La sécurité alimentaire est devenue un enjeu majeur de santé publique. Face aux scandales sanitaires, le législateur a renforcé l’arsenal juridique pour sanctionner les atteintes à notre alimentation. Plongée au cœur des infractions qui menacent nos assiettes.
Les infractions relatives à la qualité et à la composition des denrées
La falsification et la tromperie constituent les principales infractions visant la qualité des aliments. La falsification consiste à altérer frauduleusement la substance d’une denrée alimentaire. Elle est punie de 2 ans d’emprisonnement et 300 000 € d’amende par l’article L. 451-2 du Code de la consommation. La tromperie, définie à l’article L. 441-1, sanctionne le fait de tromper le consommateur sur les qualités substantielles d’un produit.
L’emploi de substances interdites dans la fabrication des denrées est sévèrement réprimé. L’utilisation d’additifs non autorisés ou le dépassement des doses maximales sont punis de 2 ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende. Les fraudes sur l’origine des produits, notamment pour les appellations d’origine protégée, sont passibles des mêmes peines.
Les atteintes à l’hygiène et à la sécurité sanitaire
Le non-respect des règles d’hygiène dans la préparation des aliments est sanctionné par l’article L. 237-2 du Code rural. Les infractions aux normes sanitaires peuvent entraîner jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 15 000 € d’amende. En cas d’intoxication alimentaire due à une négligence, les peines peuvent aller jusqu’à 3 ans de prison et 45 000 € d’amende.
La mise sur le marché de produits dangereux pour la santé est punie de 5 ans d’emprisonnement et 600 000 € d’amende par l’article L. 452-1 du Code de la consommation. Cette infraction vise notamment la commercialisation de denrées contaminées ou avariées. La non-conformité aux normes de sécurité peut entraîner le retrait ou le rappel des produits, assorti de sanctions pénales.
Les manquements aux obligations d’information et de traçabilité
L’étiquetage trompeur ou incomplet des denrées alimentaires est sanctionné par l’article L. 412-1 du Code de la consommation. L’omission d’informations obligatoires ou la présence de mentions interdites sont punies de 2 ans d’emprisonnement et 300 000 € d’amende. Les allégations nutritionnelles ou de santé mensongères font l’objet de poursuites similaires.
Le défaut de traçabilité des produits alimentaires est réprimé par l’article L. 237-2 du Code rural. L’absence de tenue des registres obligatoires ou l’impossibilité d’identifier l’origine des denrées peuvent entraîner jusqu’à 2 ans de prison et 15 000 € d’amende. La non-déclaration d’un danger lié à un produit est punie de 5 ans d’emprisonnement et 375 000 € d’amende.
Les infractions spécifiques à certains secteurs alimentaires
Dans le domaine des produits de la mer, la pêche et la commercialisation d’espèces protégées ou sous-taille sont punies de 2 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende par le Code rural. Pour les produits carnés, l’abattage clandestin est passible de 6 mois de prison et 15 000 € d’amende.
Concernant les boissons alcoolisées, la fabrication ou la vente de boissons falsifiées est punie de 2 ans d’emprisonnement et 300 000 € d’amende. Dans le secteur laitier, l’utilisation de lait contaminé dans la fabrication de fromages est sanctionnée par 2 ans de prison et 15 000 € d’amende.
La responsabilité pénale des personnes morales
Les entreprises agroalimentaires peuvent voir leur responsabilité pénale engagée pour les infractions commises pour leur compte par leurs dirigeants ou représentants. L’article 121-2 du Code pénal prévoit que les personnes morales encourent une amende dont le taux maximum est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques.
Des peines complémentaires peuvent être prononcées à l’encontre des sociétés reconnues coupables : interdiction d’exercer l’activité, placement sous surveillance judiciaire, fermeture d’établissements, exclusion des marchés publics. La publication du jugement dans la presse constitue une sanction redoutée par les entreprises en raison de son impact sur leur image.
Le rôle des autorités de contrôle
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) joue un rôle central dans la détection et la poursuite des infractions au droit alimentaire. Ses agents disposent de pouvoirs d’enquête étendus : prélèvements, saisies, visites domiciliaires. La Direction générale de l’alimentation (DGAL) intervient plus spécifiquement sur les aspects sanitaires.
Ces autorités peuvent prononcer des sanctions administratives (avertissements, mises en demeure, fermetures d’établissements) ou transmettre les dossiers au parquet en vue de poursuites pénales. La création de pôles spécialisés au sein des juridictions a permis de renforcer l’efficacité de la répression dans ce domaine technique.
Le droit pénal de la sécurité alimentaire s’est considérablement renforcé ces dernières années, reflétant les attentes croissantes des consommateurs en matière de qualité et de transparence. Si les sanctions encourues sont dissuasives, leur application effective reste un défi pour les autorités face à la complexité des filières agroalimentaires mondialisées.